jeudi 7 mai 2015

La culture - corrigé d'une dissertation : "La culture nous rend-elle plus humains?"

On considère souvent certains soldats comme des sauvages ou des barbares. On pense ainsi que c’est la culture qui nous humanise, autrement dit qui nous rendrait plus humains. Toutefois, la cruauté use des outils de la culture. Aussi, y a-t-il un sens qui fait que la culture nous rend plus humains ? Elle nous rend simplement humain car sans elle nous sommes des animaux ; elle nous rend plus humain lorsqu’elle est ouverte et universelle ; et nous rend plus humain quand elle éduque en nous la moralité.

Seule la culture permet à l’homme de développer les aptitudes qui amènent à le qualifier d’humain. Il doit apprendre à trouver sa nourriture avec des armes ou des outils, il doit apprendre qui il peut épouser, etc. Par culture on entend tout ce dont nous héritons en l’acquérant, par imitation ou bien par un apprentissage déterminé. Sans culture, l’homme n’est même pas un animal faute d’instincts qui lui dictent ses conduites pour vivre.
Or, il y a diverses cultures. Chacune définit une humanité de sorte que cela n’a pas de sens de dire que la culture nous rend plus humains. On peut alors dire avec Merleau-Ponty dans la Phénoménologie de la perception (1945) que tout en l’homme est naturel et culturel de sorte qu’il n’y a pas de norme de l’humain qui serait en quelque sorte un naturel qu’il aurait à exprimer.
Cependant, on reprend des conduites de certaines cultures pour enrichir la sienne et on en rejette d’autres comme le cannibalisme. N’y a-t-il pas une culture unique qui rend l’homme plus humain ?

En effet, au fur et à mesure que les hommes inventent des savoirs, des savoir-faire etc., certains d’entre eux améliorent l’existence humaine. C’est vrai pour les techniques. Une hache de fer est bien meilleure qu’une hache de pierre et une machine-outil est encore plus efficace. Mais c’est vrai également des connaissances, voire de la justice. Les Anciens admettaient l’esclavage que nous rejetons car il est contraire à l’idée du genre humain que nous nous faisons. Le cannibalisme disparaît.
Aussi, sont-ce des cultures qui se veulent exclusives, qui prônent la violence, qui amènent certains hommes à être inhumains, c’est-à-dire à être cruels vis-à-vis d’autres hommes pour satisfaire leurs désirs au dépend des autres, voire pour satisfaire leur désir de cruauté. Jamais un animal ne torture en connaissance de cause un membre de son espèce. Nombre de cultures humaines la pratiquent comme les anciens Iroquois avec leurs prisonniers ou les Aztèques avec leurs sacrifices humains. On peut donc avec Kant dans son Traité de pédagogie parler d’un progrès dans l’éducation qui permet à la culture comme connaissance de fonder la discipline comme amélioration par l’homme de ses désirs.
Néanmoins, si les désirs des hommes les poussent à s’affronter, cela semble justement dépendre du développement de la culture qui oppose les hommes et les rend inhumains ? Or, ce que la culture peut faire, rendre les hommes inhumains, ne peut-elle pas le faire autrement et les rendre plus humains ?

On ne peut nier que la guerre est un phénomène culturel. Elle oppose des groupes qui ne sont pas toujours de cultures différentes, comme les Français et les Espagnols au XVII°. Si elle a une origine culturelle, c’est parce qu’elle prend sa source dans les désirs des hommes qui sont illimités. Rousseau, dans le Discours sur l’origine et les fondements de l’inégalité parmi les hommes (1755), attribue à certains progrès de la technique le développement de la misère et de l’esclavage, c’est-à-dire lorsqu’elle implique la dépendance des hommes les uns des autres, ce qui arrive avec la métallurgie et l’agriculture. Comme c’est la culture qui façonne les désirs humains, l’accroissement de ceux-ci rend les hommes inhumains au sens de cruels. Pour sa part Lucrèce dans De la nature imagine que le premier qui se recouvrit d’une peau de bête fut assassiné par les autres pour le dépouiller.
Mais en réalité, c’est à la culture de tourner vers l’humain ce qui en elle est potentiellement inhumain. C’est qu’en effet, c’est plutôt un défaut de culture au sens d’une éducation morale qui fait qu’on en reste aux désirs suscités par la culture au sens de l’héritage. La culture qui consiste à prendre soin de soi et non à recevoir passivement les inventions des autres, conduit bien plutôt par la réflexion qu’elle suscite à ne pas tomber dans le piège des désirs infinis et vains et à se limiter pour vivre le plus harmonieusement possible.

Disons donc qu’au problème de savoir s’il y avait un sens à penser que la culture nous rend plus humains, nous avons vu que la diversité des cultures entendues comme inventions de façons d’être qu’on hérite, ne permet pas de l’affirmer. Par contre, la culture, dans la mesure où elle est ouverte, rend plus humain que celles qui font des autres de simples objets. Encore faut-il qu’elle soit l’œuvre de l’individu prenant activement soin de lui-même, conformément à l’étymologie latine du mot.

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